L’église de Chelles Saint Martin
L'église de Chelles
Dédiée à Saint Martin, « La cure de de l'église de Chelles est l’une des plus anciennes de la région » (J.-E. Mermet). Les absides et les piles nord datent des alentours de 1140, et constituent l’une des œuvres les plus originales de l’architecture romane de la région :
- voûtes dites « en cul de four » formant un quart de sphère sur les absides,
- fenêtres des absides garnies de chaque côté de deux colonnettes dont l’extérieure à « fût en bâton brisé » assez rare dans la région.
Le clocher central date également de la première moitié du XIIème siècle. Les ouvertures en losange qui ajourent les quatre faces du clocher au-dessus des doubles baies sont tout à fait exceptionnelles. A l’extérieur, à l’arrière de l’abside, on découvre le vallon du ru de Vandy.
L’église de Chelles est classée Monument Historique sur la liste de 1862, un projet de rénovation des absides, des plafonds des nefs et de l'autel Saint Martin a été mis en place grâce aux concours de l'Etat (Direction Régionales des Affaires Culturelles) et du Département de l'Oise. L'Association de Sauvegarde de l'église saint Martin et du Patrimoine Historique de Chelles (ASPH) pourra aussi agir en complément pour cette rénovation
Sur le plan cultuel, l'église de Chelles est rattachée à "La paroisse de la vallée de l'Aisne" avec des relais locaux pour l'animation.
L'église de Chelles, un exemple de l’art roman dans les terroirs de la Picardie.
Les absides et les piles Nord de la nef de l'église de Chelles datent des alentours de 1140. Pour la terminaison orientale du bas-côté Nord, actuellement occupée par la sacristie, il est certain qu'une absidiale s'ouvrait au XIIème siècle mais nous n'avons pas pu en découvrir la moindre trace. Le clocher est daté du XIIème siècle. Au XVIème siècle, la première arcade occidentale fut recoupée pour reconstruire la façade, et les deux murs latéraux. Les différences d'ornements apparents et les ajustements sur la façade occidentale suggèrent deux campagnes de travaux.
Sur la façade se superposent, légèrement désaxés, une grande baie éclairant la nef en partie haute et un portail à fronton curviligne encadrant l'entrée de deux pilastres.
Les arcs doubleaux du chœur auraient été réalisés également à cette époque, et furent refaits au XIXème siècle.
En effet, au XIXème siècle, la restauration fut importante, avec la couverture des absides en ardoises sur une charpente en sapin en remplacement de la couverture en pierre.
L'église Saint-Martin comprend :
- une nef à cinq travées plafonnées,
- deux bas-côtés (le bas-côté Nord est plafonné, le Sud est voûté sur croisée d'ogives),
- un transept* surmonté d'un clocher,
- un chevet en hémicycle.
*un transept : vaisseau transversal formant les bras d’une croix avec la nef. Il comprend deux bras et une croisée au centre
Le croisillon Sud est flanqué d'une absidiole. Au Nord-Est, la sacristie remplace l'absidiole.
Autre richesse de l'église de Chelles, un autel avec bas-relief sculpté du XVIème siècle.
A PROPOS DE L’EGLISE DE CHELLES par Maurice Mettelet
Il manquerait quelque chose à nos villages, si pittoresques soient-ils, si les quelques deux ou trois cents foyers qu’on peut y dénombrer ne se trouvaient groupés autour d’une vieille église qui en est comme l’âme et dont le clocher, dominant tous ces toits d’ardoises ou de tuiles, s’élève, comme une prière, vestige d’un temps de foi et de spiritualité, dont nos cieux vides conservent la nostalgie.
Pour les habitants de Chelles, leur église fait partie de leur paysage habituel, comme la vieille tour, comme le vieux pont sur le Vandy, ce ru qui serpente dans la vallée, avant d’aller se perdre dans l’Aisne.
Les visiteurs sont rares et plus rares encore sont ceux qui s’interrogent sur le passé d’un modeste village d’Ile-de-France dont l’origine est fort ancienne et dont la situation sur l’antique voie romaine (1) qui reliait Senlis à Soissons en fit, autrefois, un lieu fréquenté. Le village doit son origine à une chapelle ou oratoire établi en cet endroit, dans les premiers temps du christianisme.
C’est dans les pays de l’Oise et de l’Aisne, où coulent d’étroites rivières dans une solitude de bois, que les bâtisseurs de nos cathédrales ont mené leurs expériences, fait leurs gammes, en somme. Dans ces édifices ruraux s’annonce le développement d’un style, le passage du roman au gothique. A cet égard, l’église de Chelles est exemplaire : l’abside est encore d’inspiration romane alors que dans le chœur, le transept et le clocher, le gothique se manifeste avec prudence.
Les voutes du XIIè de l'église de Chelles
L’œil le moins averti peut déceler, d’emblée, au moins deux époques de construction. De l’église initiale, qui date du début du XIIème siècle alors que les cathédrales de Noyon, Senlis et Paris n’étaient pas encore en chantier, subsistent le chœur, le transept, le clocher ; à l’extérieur, cette partie de l’église a des baies en plein cintre mais à l’intérieur, le chœur en hémicycle, voûté en "cul-de-four" comme à la fin du XIème siècle, a une voûte renforcée par deux arcs en ogive, alors que les arcs encadrant le transept sont brisés.
*cul-de-four" : voûte formant un quart de sphère sur les absides et absidioles. Un cul de four est une demi-coupole.
Le carré du transept est voûté d’ogives, les grandes arcades côté Nord de la nef sont en arc brisé et les baies hautes de ce même côté étaient en plein cintre (elles ont été rebouchées ultérieurement).
L'apparition des arcs brisés sur le clocher de l'église de Chelles
Le clocher central date environ de la même époque (environ 1140).
L’apparition des arcs brisés* dans les baies de ce clocher mérite d’être signalée, comme l’un des premiers exemples de ce type.
Les ouvertures en losange qui ajourent les quatre faces du clocher sont tout à fait exceptionnelles : aucun autre cas n’existe dans la région. Une flèche moderne a remplacé l’ancien toit en bâtière qui couronnait primitivement le clocher.
*Arc brisé : arc formé de deux segments de cercle se rejoignant au faîte. Existe déjà à l’époque romane.
Les absides de l'église de Chelles
Les croisillons du transept étaient flanqués, chacun, d’une absidiole, également en hémicycle ; celle du pavillon sud subsiste, alors que celle du nord a disparu, remplacée par la sacristie à la fin du XIXème siècle.
L’abside est l’une des œuvres les plus originales de l’architecture romane dans la région et mérite que le visiteur s’attarde à observer tous les détails de sa composition, comme de sa décoration. Les fenêtres sont à deux rentrants, garnies de chaque côté de deux colonnettes, l’intérieure à une rainure, l’extérieure à fût en bâton brisé, assez rare dans la région ; les chapiteaux sont décorés de feuilles d’acanthe et de têtes monstrueuses ; à la base des fenêtres court une frise passant sur les contreforts, combinaison sans commencement ni fin, d’élégants méandres, motifs abstraits se répétant interminablement, parfois avec quelques variations, inspirés de modèles plus anciens, barbares peut-être ; autour des fenêtres s’enroule un cordon d’étoiles, enfin, la corniche de l’entablement est ornée d’une frise de palmettes d’acanthe présentant, à des distances régulières, des mufles d’animaux et des masques grimaçants. La corniche du clocher est semblable à celle de l’abside.
Les nefs
L’édifice initial eut-il à subir les injures du temps ou les destructions des guerres, les archives sont muettes à ce sujet. Quoi qu’il en soit, les autres parties de l’église furent rebâties au milieu du XVIème siècle, sous le règne de François Ier.
Dans la nef, le mur sud fut repris, les piles rectangulaires remplacées par des colonnes isolées supportant les arcs brisés à profil prismatique ; furent aussi rebâtis les bas-côtés, éclairés par des baies caractéristiques de la dernière époque gothique, en arc brisé, aux remplages flamboyants ; les vitraux de cette époque ont disparu, ils portaient les millésimes de 1539, 1555 et 1578.
Le bas-côté sud a été voûté d’ogives, les formes de ces moulures étant celles du XVIème siècle, mais les voûtes amorcées dans le bas-côté nord, comme dans la nef, n’ont jamais été appareillées et ces parties sont recouvertes d’un simple lambris.
Les travaux ont-ils été interrompus, faute de moyens financiers ou à cause des troubles qu’engendrèrent alors les guerres de religion dans le courant du XVIème siècle, les archives ne le disent pas non plus.
La façade
La façade est aussi une œuvre du XVIème siècle, mais un peu plus tardive. Avec son portail et sa haute fenêtre en plein cintre au fenestrage simplifié, elle témoigne timidement des apports de la Renaissance.
L’église de Chelles a pour vocable Saint-Martin
L’église de Chelles a pour vocable Saint-Martin, dont on peut voir une statue représentant un cavalier romain partageant son manteau avec un pauvre, dans une niche du croisillon nord. On peut voir dans le croisillon sud l’ancien retable du maître-autel, portant des panneaux sculptés et peints : au milieu, le Christ en croix entre deux larrons, à gauche la flagellation, à droite la résurrection. Ces reproductions, dans le style du XVIème siècle, sont d’une assez bonne exécution, quoique d’une certaine naïveté (2). Dans le bas-côté nord existent des fragments de pierres tombales dont les inscriptions sont illisibles.
La restauration du transept et du chœur, entre 1883 et 1890, n’a pas modifié sensiblement l’édifice.
Et pour conclure
Le cimetière enfin, avait tout naturellement sa place autour de l’église, et chaque génération, ensevelie sous la protection de son clocher et prête, en terre bénie, à se lever pour le jugement dernier, s’est vue recouverte par les générations suivantes.
Ainsi, notre église, modeste dans sa forme, comme dans ses ambitions, doit-elle être regardée amoureusement et entretenue précieusement, comme le témoignage d’un temps rural, peut-être bien mystérieux pour beaucoup maintenant, mais dont la clef était la foi, une foi profonde et universelle qui imprégnait la vie de l’âme comme la vie quotidienne, dans les moindres détails, ces vénérables pierres nous parlant d’un passé de générosité et d’absolu, mais aussi des choses ordinaires de la vie, comme la violence.
Comme toutes les petites églises de nos campagnes, elle ne fut certainement pas construite à grands coups d’argent, à la différence de nos cathédrales, mais elle fut le fait d’une main d’œuvre toute simple, locale, anonyme, aidée par les corvées bénévoles de toute la paroisse.
Maurice METTELET
L'historique des cloches de l'église de Chelles
La période révolutionnaire à Chelles fut fort agitée et particulièrement l’année 1793. Le premier arbre de la “Liberté” fut planté sur la place devant l’église, et le curé de la paroisse, nommé Prosper Nicolas Dupont, abandonna sa charge pour prendre celle d’instituteur. L’église fut désaffectée et deux de ses trois cloches, bénites en 1774, furent fondues pour fabriquer les canons utiles à l’armée nationale.
Aujourd'hui, le clocher abrite trois cloches
La première nommée Marie Elisabeth
La première nommée Marie Elisabeth, à droite du clocher, a été bénite en 1774 par Sébastien Grégoire, curé de la paroisse, et a traversé la tourmente révolutionnaire. On peut y lire :
“ J’ai été bénie ainsi par le curé Sébastien Grégoire, Grégoire Guillaume Germot
dudit Chapître du diocèse de Soissons de la dîte paroisse représentée.
Pierrefonds, Louis Dupre(z) Marguilliers
Guillaume et Marco
fondeur de cette cloche dans la Nièvre.
Bêthelé (†) Luc épouse
nommée Marie Elizabeth auprès du Seigneur.
Mr Desmoulin François fermier du Roi.
(Beaumont La Fermière La Nièvre)
La deuxième porte le nom de Charlotte Zélie Henriette
La deuxième, à gauche du clocher, porte le nom de Charlotte Zélie Henriette et a été bénite en 1886. On peut y lire gravé :
A la mémoire de Louis Alexandre Lefèvre, notaire.
Beaumont La Fermière dans la Nièvre
Instituteur Monsieur Louis Charlier
pendant 38 ans à Chelles,
donné par marraine Madame Corbie, Lefèvre d’Attichy, Madame Corbie sa fille Louise,
je m’appelle pour gardien et protecteur de
Monsieur Louis Charlier, Charlotte Zélie Henriette,
j’ai été bénite le 14 juin 1886
par Lefèvre Auguste Bertrand curé
en cette paroisse Saint-Martin le jour du 14 juin 1886
et en présence de Monseigneur Péronne, Evêque du Diocèse de Beauvais.
L’adjoint Charles Motay, Président du conseil de (illisible),
et pour parrain Louis Charles Léonard.
Les inscriptions de la troisième cloche sont illisibles
Les inscriptions sur la troisième cloche, soumise aux intempéries, n’ont pu être relevées avec précision vu l’oxydation en surface de la cloche.
Les cloches ont été électrifiées et l’angélus du soir sonne à nouveau depuis 2008.